
De ses origines royales à son revival durable, la soie cambodgienne mêle vers indigènes, teintures végétales et empowerment rural ; guide complet + conseils entretien.
Trésor textile de l’Empire d’Angkor, la soie cambodgienne renaît après avoir frôlé l’extinction sous les Khmers rouges. Aujourd’hui, des ateliers‑villages comme Koh Dach (l'île de la soie), Takeo, Golden Silk Pheach et l’IKTT recréent toute la filière : élevage de vers indigènes, teintures végétales, tissage ikat et commerce équitable. Si 80‑90 % du fil est encore importé, le royaume plante de nouveaux mûriers et vise l’inscription UNESCO du hol pour 2026. Ce guide détaille l’histoire, la production, les enjeux durables – et comment choisir une pièce authentique que TEVOA valorise à travers les collections de ces marques partenaires.

D’une fibre royale à une filière résiliente
Les origines
Les bas‑reliefs d’Angkor Thom montrent déjà le sampot chang kben en sergé de soie porté par la cour au XIIᵉ siècle. Les fils venaient alors d’Inde et de Chine, mais le tissage local se développe dès le VIIᵉ siècle selon les annales de Funan.
Effondrement et renaissance
La guerre civile (1967‑75) puis le régime khmer rouge interdisent la sériciculture ; la production nationale tombe sous la tonne en 1980. Les ONG japonaises relancent les élevages dans les années 1990 ; Artisans Angkor forme 1 000 jeunes ruraux dès 1992.
Vers une reconnaissance mondiale
Depuis 2023, Phnom Penh prépare la candidature UNESCO du tissage hol ikat ; l’inscription du Krama comme patrimoine immatériel fin 2023 crée un précédent encourageant.
Cartographie des terroirs de la soie khmère
Zone | Spécificité | Acteurs phares |
---|---|---|
Takeo – Prey Kabbas | Ikat hol à motifs géométriques ; 6 000 tisserandes | Coopératives familiales, expo MGC Museum |
Koh Dach (Mekong Island) | Sériciculture à échelle villageoise ; démonstrations « du cocon au métier » pour les visiteurs | Centres communautaires, Silk Island Silk, fermes familiales |
Siem Reap / Phnom Srok | Vers jaunes indigènes (Golden Silk) ; fil 30 % plus résistant | Golden Silk Pheach, ferme‑musée |
Preah Vihear | Reforestation de mûrie seed‑to‑scarf » | IKTT – Institute for Khmer Traditional Textiles |
Focus sur Koh Dach – l’Île de la Soie
Située à 15 km au nord‑est de Phnom Penh, Koh Dach s’étire sur dix kilomètres de rivage sablonneux au cœur du Mékong. Connue depuis l’époque pré‑angkorienne pour ses métiers à pédales, l’île compte aujourd’hui environ 400 familles qui élèvent encore des vers à soie, teignent avec des pigments végétaux et tissent des krama, hol et satins destinés aux marchés de la capitale.
- Les ateliers familiaux proposent des démonstrations « du cocon au tissage », un moyen clé de transmission inter‑générationnelle.
- Le tourisme responsable assure jusqu’à 50 % des revenus de certaines tisserandes, d’après le guide Wander‑Lush.
- De nouvelles micro‑entreprises commercialisent foulards et krama certifiés commerce équitable en ligne.

De la chenille au tissu – étapes clés
Sériciculture et dévidage
Les vers Bombyx mori cambodgiens sont nourris huit fois par jour de feuilles fraîches ; chaque cocon livre ~300 m de filament brut.
Teintures naturelles
- Indigofera pour le bleu, jackfruit et prahoat pour les jaunes, Garcinia cambodgiensis pour le vert.
- Combinaison indigo + curcuma = vert émeraude traditionnel.
Tissage ikat (hol)
Les fils sont attachés et teints avant le tissage, créant des motifs flous caractéristiques – technique analogue au patola indien mais avec palette khmère.
Impact social & environnemental
- 20 000 ménages vivent aujourd’hui du tissage ou de l’élevage de vers selon le Silk Centre.
- Le gouvernement vise 100 ha de nouvelles plantations de mûriers d’ici 2026 pour réduire l’importation de fil (108 k $ importés en 02/2025).
- Les déchets de cocons servent de biomasse, réduisant les émissions de CO₂ de 40 % dans certaines fermes pilotes.
Choisir, entretenir et reconnaître une vraie soie cambodgienne
- Texture : irrégularités visibles, son « crissant » quand on frotte.
- Étiquette : privilégier les labels Fair‑Weave, Artisans Angkor ou Golden Silk pour une traçabilité intégrale.
- Entretien : lavage à froid, savon neutre, séchage à plat, repassage à 110 °C max.
FAQ express
La soie cambodgienne est‑elle plus durable que la soie thaï ?
Oui : les vers jaunes locaux filent un fil 30 % plus résistant et les teintures végétales réduisent l’empreinte chimique.
Pourquoi le fil est‑il encore importé ?
La filature industrielle a disparu en 1975 ; la production locale (< 50 t) couvre à peine 10 % de la demande nationale.